John Baldessari, 1966-1970 : Du pictural à l’intermédial

Auteur / Author: 
Raphaël PIRENNE (Université Catholique de Louvain, Belgique)
Date: 
Jeudi 25 Août 2011 - 13:30
Local: 
R-R140
Séance/Workshop: 
11-3. Intermédialiser les images

 

 
Durant la seconde moitié des années 1960 l’artiste américain John Baldessari réalisa différentes séries de peintures sur toile. Celles-ci présentaient soit des textes seuls, pour la plupart des extraits, remaniés ou non, de manuels d’apprentissage, de textes de critiques ou d’historiens d’art. D’autres reproduisaient quant à elles des photographies (de lieux, d’actions, d’objets en situation) mises en rapport avec des textes décrivant l’image ainsi dépeinte sur un ton pour ainsi dire neutre, descriptif.
 
Émergeant à cette période cruciale pour l’histoire de l’art du XXe siècle, il est symptomatique que ces séries de text et de text and image paintings inscrivent un déplacement, ou plus justement une mise en crise, du principe de spécificité des médiums que la critique moderniste, de Clement Greenberg et de Michael Fried, avait établi au début des années 1960. D’extraction picturale, ces œuvres induisent en effet une forme d’intermédialité où la reproductibilité du texte et celle de la photographie jouent réflexivement, se renvoyant l’une à l’autre et produisant de la sorte une tierce image, une inter-image. 
 
Fin des années 1960, avec ses Commissioned Paintings, Baldessari radicalisera cette mise en rapport, du texte et de la photographie (et vice-versa), avant de quitter le champ de la peinture, de manière plus complexe qu’il n’y apparaît de prime abord, lors du Cremation project, lors duquel l’artiste brûla l’ensemble des peintures en sa possession peintes entre mai 1953 et mars 1966. Tout en revenant sur cette question, cruciale, d’une extraction picturale du projet baldessarien, cette communication a l’intention de revenir plus en détail sur un double enjeu théorique et historique que soulèvent les text and image paintings. Il s’agira en effet de préciser comment d’une part l’intermédialité qui préside à la réalisation et au fonctionnement de ces œuvres vient mettre en crise le paradigme de spécificité moderniste. Il s’agira d’autre part de voir comment la réception du structuralisme qui se fait jour à cette époque sur la scène des arts visuels (de Claude Lévi-Strauss et de Roland Barthes en particulier) peut aider à cerner les enjeux discursifs et méta-critiques que l’intermédialité du projet baldessarien engagent.