Les collectionneurs qui possèdent un cabinet de curiosités (lieu où le monde se dit et se rend visible par accumulation de traces et de fragments) éditent bien souvent un catalogue dans le but de faire connaître l’étendue de leur collection. Une telle publication, qui peut avoir une intention en quelque sorte publicitaire, est fréquemment accompagnée de gravures, destinées à montrer, mieux encore que la liste inventoriant les curiosités, tantôt des objets pris individuellement, tantôt une vue globale du cabinet où sont renfermés les trésors, tantôt un portrait du collectionneur — parfois les trois. Dans la plupart des cas, la représentation figurée est accompagnée d’inscriptions qui lui donneront un sens, qui orienteront la compréhension, ou révèleront un aspect que le dessin ne permettait pas de deviner. Le lecteur spectateur est donc convié à un va-et-vient entre dessin et inscription, pour revenir enfin au dessin avec un œil plus informé. C’est dans la complémentarité entre le texte (même très bref, réduit à une étiquette placée sous un objet, ou sur un tiroir) et l’image (qui ne disait pas tout), que le sens se construit, qu’un savoir s’élabore… ou qu’une énigme s’épaissit — si l’auteur souhaite garder intacte l’étrangeté de l’objet, et laisser s’ouvrir l’imaginaire).
En étudiant les voix qui s’expriment au fil de ces inscriptions, en prenant en considération les leurres que peut contenir le fragment inscrit, et son jeu parfois trompeur avec l’image, on pourra se demander ce que de telles inscriptions entendent faire croire, faire comprendre ou dévoiler, mais aussi comment le texte met ainsi en œuvre à la fois sa promotion dans l’actualité, et ses propres traces mémorielles.