Entre science et fiction. La ville à l’heure de la société de l’information : Généalogie d’une invention

Auteur / Author: 
Enrico CHAPEL (Laboratoire de Recherche en Architecture, École nationale supérieure d’architecture de Toulouse et Laboratoire Espaces Travail, École nationale supérieure d’architecture de Paris, France)
Date: 
Thursday, August 25, 2011 - 13:30
Local: 
R-R130
Séance/Workshop: 
33-3. Projections urbaines

 

Les architectes et les urbanistes agissent avec l’espace et le font en parlant et en dessinant. Ainsi, il serait illusoire de séparer le monde concret des structures urbaines de celui de ses diverses représentations dans la peinture, la photographie, le cinéma, la science, la cartographie, et la littérature. La ville tient indissolublement de la réalité et de l’idée, de l’objet construit et de sa représentation.
 
Dans cette communication, je me propose d’analyser un champ particulier de la ville représentée : celui des espaces virtuels qui tirent leurs formes de l’interprétation d’un ensemble d’informations numériques et de calculs. Je nomme ces espaces de « statistiques », car ils sont la manifestation de l’association qui s’opère parfois entre la réalité architecturale et urbaine et sa lecture guidée au moyen de chiffres, de cartes, de tableaux et d’autres modélisations. Ces espaces incarnent le regard métrique et calculateur, connectent la pensée visuelle avec la pensée rationnelle et, ce faisant, instaurent un paysage inédit doté d’une spatialité et d’une temporalité propres.
 
À travers l’analyse de travaux d’architectes et d’urbanistes ayant opéré tout le long du XXe siècle, je tenterai de montrer que la montée en puissance des technologies de l’information a coïncidé avec l’essor d’une nouvelle approche de l’urbanisme. L’idée d’un urbanisme paramétrique (Zaha Hadid, Paul Schumacher, O.N.A., M.V.R.D.V., etc.) n’est que la dernière manifestation d’une tendance en acte depuis la fin du XIXe siècle, époque pendant laquelle la statistique graphique, cette re-présentation spécifique du monde, ce discours imagé sur le chiffre, affecte les modalités de production et de réception des projets urbains. Espace total et finement ordonné, dont la perception refléterait le monde réel, le paysage statistique apparaîtra aussi comme une géographie imaginaire dont les architectes jouent.