Saga de Tonino Benacquista : Un plaidoyer in vivo pour la série télévisée à travers un imaginaire positif pour le public ?

Auteur / Author: 
Séverine BARTHES-VIGNES (SCÉR, Université Paris-Sorbonne, France)
Date: 
Mardi 23 Août 2011 - 13:30
Local: 
R-R130



Saga de Tonino Benacquista semble une exception dans la production littéraire française contemporaine s’intéressant à la télévision : datant de 1997, à une époque où, en France, les séries télévisées n’avaient pas encore atteint le statut d’objet culturel légitime, il propose une vision désenchantée du monde de la télévision, mais à travers une écriture jouissive qui nous montre, en une mise en abyme de la figure de l’écrivain, une télévision où les scénaristes ont le vrai pouvoir.


En outre, alors que la plupart des romans français contemporains prenant pour thème la télévision, soit s’intéressent à ses effets sur les téléspectateurs (La Télévision de Jean-Philippe Toussaint ou Zapping de Didier Daeninckx) soit en reprennent des « mécaniques d’écriture » dans une perspective de transmédiation (Doggy Bag de Philippe Djian), Saga est une plongée directe dans le monde des séries télévisées en nous en montrant les coulisses et les enjeux de pouvoir, mais aussi leur réception en tant qu’objet économique et culturel.


Saga se distingue ainsi à deux chefs principaux du reste de la production romanesque française de ce type :


– il propose une vue globale du processus de création, d’écriture, de production et de réception des séries télévisées ;


– le public n’y est pas décrit à travers la figure d’un téléspectateur passif, au « temps de cerveau disponible » grignoté par les programmes, mais au contraire de façon positive, comme un acteur à part entière du processus.


La critique de la télévision exprimée par le roman porte ainsi bien davantage sur les conceptions erronées de ses dirigeants que sur l’effet supposé dévastateur de celle-ci sur les téléspectateurs. Le roman propose ainsi une expérience tout à fait inédite à son lectorat : la possibilité de s’identifier, sans être renvoyé à une image négative de public captif et sans recul.