D’aucuns s’interrogent sur la mélancolie de Marcel Proust, trait de caractère ou état psychique — je n’en débattrai pas ici — qu’il aurait sublimé par son acte de création littéraire, avec l’œuvre À la recherche du temps perdu (Robitaille, 2010). En aval de ce questionnement, c’est-à-dire en considérant l’imaginaire mélancolique proprement dit de l’œuvre proustienne, s’il en est, et sa représentation, je m’intéresse, dans cette communication, à un extrait d’une réminiscence enfantine du narrateur de Du côté de chez Swann, a priori mélancolique. Je souhaite montrer comment ce souvenir peut se révéler profondément mélancolique, lorsque Stéphane Heuet adapte, en bande dessinée littéraire, avec Combray, une partie de l’œuvre proustienne. De cette transposition, voire adaptation, sourdent des transformations et non-transformations textuelles et évidemment, des adjonctions iconiques et des liens intersémiotiques, qui donneraient corps et figure à une pesanteur mélancolique. Ainsi, il s’agira tout d’abord, d’analyser la réminiscence extraite de La Recherche sous l’angle de la sémiotique textuelle. Ensuite, j’observerai la conjugalité iconique et textuelle de cette réminiscence dans la bande dessinée littéraire de Stéphane Heuet. Et enfin, j’étudierai quelles sont les opérations intersémiotiques qui auront été mises en œuvre lors de l’adaptation interartistique à partir du texte littéraire, medium monosémiotique et monosensoriel, vers la bande dessinée, medium polysémiotique et monosensoriel. L’objectif de cette démarche est de mettre en évidence les stratégies langagières (visuelles et textuelles) mises en place par Stéphane Heuet pour figurer la mélancolie — qui semble être non seulement celle du narrateur, Marcel, et celle de son homonyme écrivain — ainsi que de comprendre comment elles en augmentent l’intensité.