Le sport est une pratique ritualisée, construite autour de coutumes intégrées et transmises, de marqueurs d’appartenance qui consacrent l’identité des pratiquants et des supporteurs. Le baseball participe à une telle règle, en codifiant très rapidement les éléments de son rite : présentation des hymnes nationaux, chant de la septième manche, le cri
« Play Ball » qui scande le début d’une partie, autant d’éléments qui instaurent une certaine chorégraphie à chaque match. Or, un élément majeur participe à cette scénographie sans qu’on ait bien jugé, à ce jour, de son importance :
la description de la joute, fonction remplie par un personnage attitré, payé par l’équipe et qui en incarne la voix officielle, le descripteur. Sa manière de conter le match, sa présence quotidienne, ses manies langagières, sa communication directe avec les partisans en font un pôle incontournable du rituel sportif. Dans cette communication, j’entends évaluer succinctement la mise en scène de ce personnage, tant dans des films populaires (Major League, A League of their Own, Un été sans point ni coup sûr) que dans des romans contemporains (Underworld de Don DeLillo, Rat Palms de David Homel) afin de cartographier les fonctions mémorielles et de transmissions attribuées à cette figure en fonction de son insertion dans le récit, de son autorité narrative et de sa place dans la hiérarchie sociale qu’est le microcosme sportif. De cette manière, le baseball en tant que narration continuelle, ressassement qui unit les générations, sera intimement lié à celui qui organise le récit, qui lui impose ses passages obligés, qui en module la mémoire. Cette communication fera alors l’hypothèse que le rite du baseball varie peu dans les fictions parce que le descripteur s’arroge le rôle de gardien des traditions. Le rite ici est un savoir partagé transmettant le poids d’un passé sportif qui édifie le présent et le met en perspective. L’affiliation qu’il suppose nécessite un héraut : le descripteur.