La rhétorique de l'impertinence tezukaesque dans Bouddha, ou comment parler de biographie aux garçons

Auteur / Author: 
Nhu-Hoa NGUYEN (ÉMI, Université du Québec en Outaouais, Canada)
Date: 
Mardi 23 Août 2011 - 10:15
Local: 
R-R140
Séance/Workshop: 
21-2. Des imaginaires déployés

 

Bouddha d’Osamu Tezuka se veut une biographie quelque peu romancée qui retrace la vie entière du fondateur de la religion qui porte son nom. Ciblant le public spécifique de jeunes adolescents japonais, faits historiques et réalisations spirituelles du grand sage indien sont tour à tour contés dans un style propre au shonen, soit un ton narratif qui va du sérieux aux références extradiégétiques hilarantes, et un style graphique ponctué de prototypes ludiques, d’anachronismes et de caméos. De plus, l’utilisation systématique d’un vedettariat qui n’appartient qu’à Tezuka incite le lectorat cible à suivre allègrement les péripéties de l’histoire à travers les huit volumes du roman graphique.


Cependant, si ces techniques narratives établissent une communication directe avec les jeunes lecteurs, leur réussite est due à une insistance continuelle sur les légendes brahmaniques, les batailles, les conflits de pouvoir entre pères et fils et les atrocités causées par le système de castes indien. Regrettablement, elles forcent l’auteur à abandonner certaines notions clés du bouddhisme tel que nibbana (état d’extinction de tout désir) et annata (non-soi).  


Il en résulte une œuvre ludique impressionnante qui dépeint Bouddha comme un être humain sujet à toutes les humeurs du commun des mortels. En délaissant le cœur de l’enseignement du Bouddha, Tezuka rend sa biographie plus accessible sans toutefois parvenir à représenter la complexité de ses pensées essentielles.