Imaginaires de l’image et du mot merveilleux dans les livres 
« surréalistes » de Lise Deharme et Gisèle Prassinos

Auteur / Author: 
Andrea OBERHUBER (Département des littératures de langue française, Université de Montréal, Canada)
Date: 
Vendredi 26 Août 2011 - 14:00
Local: 
R-R130

 

Fidèle à l’esthétique « révolutionnaire » propre aux avant-gardes de l’entre-deux-guerres, bon nombre d’auteurs, de peintres et de photographes se sont lancés dans l’aventure de la création à quatre mains, dépassant par là, du moins en partie, l’esthétique du livre illustré style XIXe siècle. Mettant en pratique les principes de l’ars combinatoria et de la collaboration interartistique, ces auteurs et artistes visuels défiaient les frontières conventionnel entre le textuel et le visuel, entre les arts et les médias. Si les illustrations de Max Ernst pour Crevel, Tzara ou Péret, celles de Magritte et Man Ray pour Éluard ou celles de Masson pour Aragon, Bataille et Leiris font aujourd’hui partie des grands classiques du livre dit surréaliste, la collaboration entre femmes auteurs et artistes du Surréalisme semble moins connue. Ces créatrices surréalistes faisaient pourtant preuve le plus souvent d’une véritable praxis intermédiale, c’est-à-dire que, pour la plupart, elles investissaient d’office deux arts et leur médium respectif : l’écriture et le cinéma (Belen alias Nelly Kaplan), l’écriture et la photographie (Claude Cahun), l’écriture et la peinture (Leonora Carrington) ou l’écriture et le dessin (Unica Zürn). Les deux cas de figure que je me propose d’examiner de plus près, dans le cadre d’une réflexion sur les rapports texte/image, sont représentatifs d’une nouvelle conception de l’espace livresque, telle que mise en œuvre par l’esthétique surréaliste : je m’intéresserai d’abord au livre comme espace d’un imaginaire débridé, de collaboration et de dialogue intermédial chez Lise Deharme, ensuite au livre-objet comme possible lieu de métamorphose chez Gisèle Prassinos. Les deux auteures(-artistes) font éclater les limites anciennement assignées au « livre illustré » se rapprochant davantage de ce que l’on désigne aujourd’hui comme « livre d’artiste ». M’inspirant des recherches menées par Henri Béhar, Renée Riese Hubert, Lothar Lang et Montserrat Prudon dans le contexte du surréalisme et du livre, je m’interrogerai sur les rapports de collusion et de collision entre le textuel et le visuel, de même que sur le type de lecture exigé par le nouvel objet « livre ». Mon analyse prendra appui sur Le Cœur de Pic (Deharme/Cahun), Le Poids d’un oiseau (Deharme/Fini) et Brelin le frou ou le Portrait de famille (Prassinos/Prassinos).