Images de l’interprète dans son texte : Jean Starobinski

Auteur / Author: 
BOTH, Ioana (Université Babes-Bolyai, Roumanie)
Date: 
Lundi 22 Août 2011 - 13:30
Local: 
R-R120

 

Ma communication fait partie d’un projet actuellement en chantier, consacré aux figurations de l’interprétant dans la critique et la théorie littéraire contemporaines. Je me propose donc de creuser plus loin l’interrogation maîtresse des Allégories de la lecture (Paul de Man), How can you tell the dancer from the dance? (Yeats), et de configurer un univers imaginaire par le biais des topoï rhétoriques des textes théoriques et critiques.


Pour cette communication, le théoricien visé sera Jean Starobinski, afin de regarder de près le fonctionnement — dans un registre de l’imaginaire du texte starobinskien — de certains concepts qui l’ont rendu célèbre : la transparence, la conscience critique, la mouvance, l’action et la réaction. Je suivrai les façons de figurer la présence-absence du critique dans cette « danse » 
qu’est son interprétation, en m’appuyant sur des microlectures de fragments tel : « Le peintre, le musicien, le poète me précèdent. Ce que je désire comprendre, ils le savent déjà. Devançant tous les jugements que je pourrais tenter, toutes les relations que je cherche à éclairer, ils m’offrent, dans leurs moments heureux et leur œuvre accomplie, le modèle d’évidence où rêve d’accéder mon travail. Evidence qui serait le lieu — toujours différé — de notre rencontre. La figure tracée par le peintre est accourue en ma direction, elle me fuit en son matin charnel : elle préfigure, pur élan d’un corps, ce que je n’ai cessé d’espérer, ce que je persiste à attendre de moi-même, ce que je voudrais apprendre à recevoir... » (Starobinski, 1986 : 275). Tout un imaginaire de l’acte interprétatif — mais aussi du sujet interprétant — est ici à l’œuvre, dans la mouvance des deux consciences qui se rencontrent sur des lignes de fuite : les expériences affectives ainsi que les approches émotives sont à cerner dans des suites de figurations qui viennent récupérer et (ex)poser le non-dit de la lecture critique : le critique lui-même. La position de Starobinski sur la « transparence » de l’acte interprétatif se voit contrebalancée dans ses écrits par une apparition en « contre-figure » rhétorique ; l’interprète se donne à voir par le biais des figures discursives. Question de réfléchir sur la façon dont l’imaginaire de la théorie, loin d’être une 
« nouveauté », y participe de manière constitutive.