Dans le texte de l’appel à communications, V. Lavoie suggère que l’idéal démocratique qui animait les pionniers de la photographie est aujourd’hui réactivé dans le contexte des techniques numériques. Mais au-delà des similarités que l’on peut repérer entre les deux époques, quelles sont les spécificités de la situation contemporaine du point de vue des pratiques amateurs ? La thèse défendue ici est que l’imaginaire démocratique de la photographie numérique est en partie lié aux modes de diffusion, de circulation et de médiatisation des images sur les réseaux numériques, et notamment sur le Web (Gunthert, 2009). Parmi les nouveaux usages numériques qui se sont développés depuis quelques années, en particulier avec la génération des applications dites 2.0 (Rebillard, 2007), je propose d’aborder la question de l’indexation collaborative des photographies en ligne. En appuyant l’analyse sur les résultats d’une enquête menée lors de ma thèse (2009), je souhaite dans un premier temps expliciter les points de croisement entre l’imaginaire démocratique de la photographie (Barboza, 2001) et du Web (Flichy, 2001). J’insisterai plus spécifiquement sur le mythe de l’album universel pour montrer comment celui-ci s’incarne dans l’exemple de Flickr. Pour illustrer les effets performatifs de cet imaginaire, je montrerai dans un second temps comment les pratiques amateurs de partage et d’indexation de photographies suscitent l’intérêt des institutions de la mémoire (Merzeau, 2009), qui développent des projets d’indexation collaborative invitant les amateurs à commenter et à taguer leurs photographies (Peccatte, 2009). Quel est l’intérêt de donner une place d’experts aux amateurs dans ces projets ? Quelles sont les limites de cette croyance démocratique en l’expertise des amateurs ? Comment faire la critique des mythes des sites collaboratifs sans verser dans une condamnation de la trivialité et de l’ordinaire des pratiques populaires ?